A Bayonne hier, la foule revendiquait la paix. Et l'on se demandait si elle en voulait à Franco, à la France, ou à ETA.
Ce 8 avril 2017, l'organisation terroriste aura donné ses caches. D'armes, de munitions, d'explosifs. Et demande désormais que l'on cesse les poursuites.
Carlos, dans sa cellule dorée où il croupit à perpétuité pour d'innombrables attentats aura souri. Lui, l'impétueux combattant armé qui revendique le statut de "révolutionnaire professionnel" a du se dire qu'une page se tournait. Il a revu le ciel doré de Damas, humé le souvenir du thé brûlant à la terrasse des cafés au Yemen. Il a sans doute repensé à cet "enlèvement" par les forces spéciales françaises, un jour au Soudan.
Né sous l'étoile romantique marxiste des années 70, ETA avait vu le jour sous une inspiration catholique progressiste. L'idéal chrétien-démocrate n'aura pas duré.
ETA en fait n'a rien compris. Dès le début.
Dès 1973, l'organisation n'avait plus grand chose à faire de ses idéaux. En assassinant l'Amiral Carrero Blanco, alors que le régime franquiste commençait, doucement mais sûrement à s'ouvrir, sous le poids fatigué d'un Franco à bout de souffle, ETA a passé une vitesse. Celle de trop.
L'Espagne et son Roi, la légalisation du parti communiste, le processus démocratique enclenché à la force de la volonté de Juan Carlos, contre les fidèles franquistes, au risque d'un coup d'Etat en 1981: de tout cela, ETA n'a rien vu. Ou pas voulu voir.
Pis, l'organisation basque, sous couvert d'une lutte faussement libératrice, est devenue une simple organisation de terreur: rançons des Basques, enlèvements, assassinats. 829 morts tous azimuts (dont la moitié de civils), comme une corrida qui n'en finirait pas de sueur et de larmes. Sans le style. Sans toro.
ETA n'a rien compris. Des années 80 et de ses nouvelles moeurs.
On a tué pour elle, plus que jamais alors que l'Espagne était devenue, depuis longtemps, un espace de libertés et d'expression. On a assassiné sans voile, avec la cruauté qui n'avait plus lieu d'être, dans un pays pacifié, ou tout au moins libéré de 40 ans de Franco.
Il est ainsi flagrant, au décompte des morts par ETA de constater que l'organisation n'a jamais autant tué que dans l'Espagne démocratique. Paradoxe injustifiable. Preuve d'une dérive de pure terreur que ni les institutions espagnoles, ni l'idéal révolutionnaire marxiste ne peuvent expliquer.
Sauf la folie d'une organisation qui, dans le fond, n'a jamais ou presque compris sa raison d'être.
Sinon celle de tuer. Aveuglément.